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HYPERSENSIBLES : UN OUTIL POUR EN FINIR AVEC LA RUMINATION

« Je suis très peinée par quelque chose qui m’arrive en ce moment.

J’ai une amie, très proche – enfin, je la croyais très proche – qui, depuis quelques temps, prend ses distances.

Ce qui me fait penser ça, c’est qu’elle met des jours à répondre à mes messages, alors qu’avant on échangeait beaucoup.

J’ai l’impression qu’elle est ‘passée à autre chose’.

Je sais, c’est bizarre de dire ça, on dirait que je parle d’une relation de couple, mais pour moi, c’est presque la même chose.

J’ai le sentiment que d’amies, on est passées à simples connaissances.

J’essaie de me raisonner, en me disant qu’elle a sans doute plein de raisons de tarder à me répondre, mais je me rends compte que ça me bouffe.

J’y pense tout le temps, je cherche à
comprendre et, parfois, j’en pleure tellement c’est dur de n’avoir aucune idée de ce qui se passe.

Mon mari me dit que je suis trop sensible, que je me prends trop la tête.

Et je vois bien que ça me touche excessivement. »

témoignage d’une participante du programme Boule de Vie


✨ ✨

En matière de relations, j’ai commencé par apprendre à une école qui prônait le principe suivant : « Je ne dois rien à personne, personne ne me doit rien. J’ai une personnalité déconnante, donc je n’ai pas à avoir de telles pensées et encore moins à envahir l’autre avec mes dysfonctionnements. Je serre les dents et je pense à autre chose. »

Cette approche aura eu l’immense mérite de me faire comprendre que chacun vit dans sa propre galaxie, avec ses problèmes, ses contraintes, ses expériences et qu’il est pathologique de personnaliser (prendre personnellement) les comportements des autres, que nous ne sommes pas au centre de leur système solaire.

Cette approche m’a appris à prendre du recul sur ce que je pouvais penser d’une situation et à réaliser que mon interprétation des choses est le résultat de mes croyances et de ma manière de voir le monde.

Le problème, c’est que, si de l’extérieur, ma communication a semblé plus saine, cela n’enlevait rien à l’angoisse et la tristesse que je pouvais éprouver en situation d’incompréhension relationnelle.

En gros, je foutais la paix aux autres, mais de mon côté, ça n’allait pas tellement mieux.

Ma formation et mes convictions personnelles m’ont menée vers une approche qui me semble plus écologique pour tout le monde (écologique signifiant bénéfique, sain, positif, pour tous les élément du système = je fous la paix aux autres, mais je ne reste pas non plus en souffrance seul-e dans mon coin de peur de les déranger).

C’est cette approche que je propose aux personnes que j’accompagne et elle se décline de la manière suivante :

  • Je vois bien que, quand je ne comprends pas ce qui se passe dans une relation, je me mets à ruminer. J’essaie de comprendre ce qui se passe, j’émets des hypothèses et je tente de me raisonner avec des arguments logiques. Je me force à ne pas trop y penser. Pourtant, je ne peux m’empêcher de penser à cette situation et je cherche des explications. J’ai besoin de savoir, de comprendre, d’y voir clair, d’être fixée, en somme.
  • Je sais que de telles situations activent un de mes schémas (généralement l’un des schémas carence affective et particulièrement l’abandon) et que, par définition, un schéma s’auto-entretient : si j’ai une forte blessure d’abandon, toutes mes pensées vont venir valider mon schéma et ma peur de l’abandon. Je fais une sorte de sélection automatique des faits et je ne garde que les infos qui peuvent venir confirmer mon schéma. Je ne le fais pas exprès, c’est ainsi que les schémas fonctionnent. Toutefois, comme je connais un peu les dessous de mon fonctionnement, je peux déjà prendre un petit peu de recul et relativiser.
  • Toutefois, savoir intellectuellement que je suis probablement juste en train d’alimenter mon schéma n’enlève rien à l’angoisse et à la tristesse que je ressens. Je ne peux pas juste faire comme si elles n’étaient pas là, elles sont bien là.
  • Alors, le meilleur moyen d’y voir plus clair, c’est de prendre mon courage à deux mains et de questionner l’autre, qui est encore la personne la mieux placée pour pouvoir m’éclairer.

✨✨✨

Questionner, c’est quoi ? C’est dire à l’Autre : j’ai besoin de partager quelque chose avec toi. Je ne sais pas du tout si je me fais des idées ou non, mais il se passe telle chose (je vois que tu mets plusieurs jours à me répondre, alors qu’avant, on échangeait beaucoup), ça me fait ressentir ça (ça me rend triste), j’ai peur que ça soit le signe que telle chose se produit (j’ai peur que ce soit le signe que tu t’éloignes, ou d’avoir fait quelque chose de mal et de ne pas m’en être rendue compte). Est-ce que je me trompe ? (Comment tu vois les choses ?)
A ce stade, la majorité des personnes que j’accompagne freinent des quatre fers : « Attends, mais il/elle va penser que je suis dingue » ; « je vais passer pour un-e relou, non ? » « Je vais pas le/la déranger pour si peu, c’est pas si grave que ça finalement. »

En réalité, souvent, si, c’est si grave que ça. Le truc, c’est que nous, ruminer nos pensées, ça nous coûte énormément.

On cherche à expliquer seul-e dans soin coin des faits dont on ignore totalement la portée et le sens. On tire des conclusions tout-e seul-e et on oscille entre les phases pendant lesquelles on se raisonne – « non, mais je me fais des films, je suis trop sensible, c’est tout » et des phases où on se laisse rattraper -« je suis peut-être trop sensible, mais je me sens complètement désespéré-e face à cette situation incompréhensible pour moi. »
Cela nous coûte infiniment plus à nous de rester dans cette angoisse qu’à l’autre de prendre quelques minutes pour répondre à un message et nous dire que tout va bien ou d’avouer qu’en effet, on l’a blessé.

Alors, évidemment, on ne fait pas ça n’importe comment. C’est surtout la forme qui va déterminer si on est envahissant ou non : sauter sur l’autre avec des angoisses, parce qu’il n’a pas répondu dans la seconde, c’est pathologique et envahissant. Sauter sur l’autre en lui reprochant de ne pas communiquer plus, pareil. Sauter sur l’autre en se plaignant, pareil aussi.

C’est une histoire de juste dosage : on laisse le temps à l’autre de vivre sa vie, personne n’a à nous répondre dans la minute, ni même dans la journée. Quand ça devient trop difficile, qu’on commence à s’inquiéter vraiment, alors seulement on peut se manifester et questionner.

Mais attention à la forme : la communication non-violente est votre meilleure amie pour communiquer justement (comme dans le modèle noté précédemment). Si vous respectez ces étapes, non, vous n’allez pas passer pour une personne chiante.

Attention : dire ce qu’on ressent avec la bonne forme, au bon moment, n’est pas un sésame automatique vers le cœur de l’autre.

Il y a des gens qui n’ont PAS envie de communiquer, qui n’ont pas envie de savoir ce que vous ressentez.

Et ce n’est pas toujours le signe que vous avez déconné.

On peut faire son maximum pour communiquer juste, authentique et dans le respect de l’autre, mais l’autre n’est pas un pantin : il n’existe aucune formule magique plus forte que le libre-arbitre de chacun d’entre nous.

Toute personne est tout à fait en droit de ne pas être intéressée par ce qu’on a sur le cœur.

La bonne nouvelle, c’est que le fait d’oser questionner est absolument libérateur en soi (quand c’est bien fait, c’est-à-dire qu’on partage ce qu’on ressent, on propose à l’autre de nous apporter un éclairage, mais on n’exige rien de sa part).

C’est comme si vous étiez clean : j’ai dit ce que j’avais sur le cœur, je laisse à l’autre la responsabilité de répondre ou non, mais moi, je me sens en paix.

✨✨✨

Lorsque j’ai abordé ce sujet avec la personne concernée, elle m’a posé deux questions :

Mais ça, on ne peut pas le faire avec tout le monde, n’est-ce-pas ? Par exemple au travail ?

Moi je crois qu’il est rarissime de ne vraiment pas pouvoir le faire. Bien évidemment, on ne va pas communiquer de la même manière avec son boss qu’avec sa meilleure amie ou son date Tinder. Mais je ne vois absolument aucune contre-indication au questionnement. A condition de respecter les conditions de forme, cela ne peut apporter que du bon (y compris quand la personne en face n’a pas envie de communiquer… auquel cas, on a besoin d’un peu de courage pour accueillir ce que cela nous fait et tirer nos conclusions sur la relation).

Mais est-ce que toi, tu questionnes, des fois ?

Moi, oui, tout le temps. La magie, c’est aussi que, parce que je me suis autorisée à beaucoup questionner, j’en ai de moins en moins besoin parce que j’ai enregistré émotionnellement les réponses des personnes qui comptent pour moi. Mais chaque fois que je me retrouve dans une situation d’angoisse relationnelle, je questionne. Systématiquement.

Que ce soit clair : la boulimie disparaît, la personnalité demeure. C’est une personnalité consciente de ses schémas, apaisée et plus fonctionnelle, mais une personnalité qui conserve des traces de fragilité, tout de même.
Je ne crois pas qu’un schéma d’abandon disparaisse tout à fait un jour, par exemple.

Donc on peut choisir de faire comme si on n’avait même pas mal et se forcer à penser à autre chose quand on est dans une situation douloureuse.

Ou alors on peut accepter que, même si c’est une blessure qui parle, les émotions sont là et que ça ne coûte pas grand-chose de questionner l’autre, après tout.

Donc oui, je le fais, chaque fois que j’en ai besoin : dans mon couple, avec ma famille, mes beaux-parents, mes amis, dans mes relations de travail aussi. Ce n’est pas toujours confortable (surtout dans le pro), mais je n’ai pas le choix si je veux vivre bien et, personnellement, je veux vivre bien.

Alors, qui parmi vous compte s’approprier cette arme anti-rumination ?

 

One Comment

  • Anonyme

    Bonjour, super l’article. En ce moment je n’arrête pas de pleurer, ruminer a cause de l’amitié. J’ai l’impression qu’une amie est différente avec moi, j’en veux à ma sœur parce qu’elle ne cherche pas vraiment à savoir si je vais bien. J’ai l’impression que tout le monde s’en fout de moi. J’ai des idées noires.

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