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TCA et Corona. Comment gérer au mieux l’épisode Coronavirus quand on souffre de troubles alimentaires ?

Voyant fleurir des messages de détresse sur les quelques groupes de soutien aux TCA et ayant reçu de nombreuses questions à ce sujet, j’ai décidé de vous faire cet article.

Je vous préviens tout de suite, au cas où vous ne connaîtriez pas encore la politique de la maison, ce n’est pas un article formule magique, avec les 10 conseils pour kiffer votre life de boulimique malgré le Covid-19.

Il s’agit avant tout de rester pragmatique et de faire avec ce qu’on a.

Face à l’épisode Covid-19, les deux plus grosses craintes que je recense chez les personnes souffrant de troubles alimentaires sont :

La peur du manque

La peur du confinement


1. La peur du manque

Je souhaiterais vous transmettre un message ferme : c’est NORMAL d’avoir peur de manquer de nourriture pour faire vos crises.

Une personne, par exemple, postait hier sur son profil Instagram :  » Je m’en veux terriblement, parce que je n’ai même pas peur de choper le virus ou que quelqu’un le chope. Non, en réalité, ma plus grande peur – et j’en ai honte – c’est de manquer. Je vois les gens se ruer au supermarché et j’ai peur de ne pas avoir assez pour assouvir mes crises. »


Si vous pensez la même chose, vous n’êtes PAS égoïste ou insensible.
Je le répète, encore et encore : la boulimie et l’hyperphagie sont des addictions. Elles dépassent votre volonté, votre bon sens, elles sont tout simplement plus fortes que vous. Dans ce contexte, craindre de manquer est plus que légitime.


Sans vouloir participer à la psychose ambiante (pour le moment, les supermarchés font leur possible pour être raisonnablement approvisionnés, en tout cas, dans la plupart des régions de France), je vous invite à ne surtout pas vous dire que vous n’allez pas anticiper vos prochaines crises, « comme ça vous serez obligé-e de ne pas en faire.« 


C’est une idée qui peut sembler pleine de bon sens et très responsable aussi et pourtant, si vous êtes boulimique ou hyperphage « actif », c’est une très, très mauvaise idée.

Comme je le dis tout le temps : vos crises ne vont pas disparaître par magie ou sous l’action de votre volonté.

Je ne vous dis pas d’aller dévaliser ce qui reste en rayons comme ont pu le faire certains consommateurs. Mais faites juste, si vous le pouvez, quelques réserves en prévision de vos crises, si jamais vous étiez amené-e à rester enfermé-e à la maison ou que les stocks se renouvelaient moins vite que prévu. (oui, ça peut choquer de lire ça, mais c’est un des piliers assumés de mon travail : je ne suis pas pour résister aux crises, qui sont de toute façon bien plus fortes que la volonté).


Si vous êtes tenté-e de profiter des circonstances pour vous obliger à ne pas faire de crises, vous risquez de très, très mal le vivre. Le climat est déjà suffisamment anxiogène, il est donc possible que vous soyez amené-e à faire des crises.

Si vous devez faire une crise, vous vous donnerez tous les moyens de la faire, de toute manière, même si vous n’avez rien pour à la maison.

Autant vous épargner du stress et anticiper.

Je le dis tout le temps : ce n’est PAS le fait d’avoir des aliments de crise chez vous qui va vous faire faire des crises. Donc rangez votre nourriture au placard, ne la laissez pas sur la table, mais ne jouez pas le jeu de : « Je vais profiter de la pénurie qui est en train de se créer pour me forcer à arrêter mes crises. »
Sans dévaliser les magasins, prévoyez vous juste un petit stock pour vos éventuelles crises de boulimie/hyperphagie. Avec un peu de chance, vous ne taperez même pas dedans, mais le fait de savoir que c’est là vous rassurera.


2. La peur du confinement

Nombreux-ses d’entre vous trouvent un équilibre dans la réalisation d’activités diverses.

« Je ne sais pas comment je vais faire si je ne peux plus sortir, voir des amis, aller à la salle de sport. Cet équilibre dans ma vie m’aide à gérer mes TCA tant bien que mal et je suis complètement paniquée à l’idée de devoir rester enfermée à la maison. J’ai peur de devenir dingue. »


Si vous ne vivez pas seul-e, surtout, soyez très clair-e avec vos proches sur votre besoin d’avoir de l’intimité. Les crises ne sont pas seulement un moment où on se remplit, ce sont aussi des moments à l’abri du regard des autres, où on peut être seul-e, complètement soi-même. On a besoin, parfois, d’être seul-e et il ne faut négliger ce besoin à aucun prix.


Il peut être extrêmement compliqué pour des personnes boulimiques ou hyperphages de trouver le repli et l’isolement nécessaires pour vivre leurs crises quand elles vivent avec d’autres personnes, surtout dans un petit espace (coucou les familles qui vivent dans un deux-pièces, ou les couples dans un studio).

Vous DEVEZ affirmer vos besoins : « J’ai besoin d’être un peu seul-e, j’ai besoin de m’isoler, etc. »


Comme l’autre ne peut pas forcément aller dans une autre pièce, voire sortir de l’appartement, utilisez aussi n’importe quel moyen de vous mettre dans votre bulle. Par exemple, en vous plongeant dans un livre, avec des boules quiès, en regardant une série, en écoutant de la musique, peu importe.

C’est toujours mieux que rien.


On peut se fatiguer vite au contact des autres, y compris de ceux qu’on aime.

Aussi, je vous encourage à vous ménager une bulle, même si c’est bien plus simple à faire dans une maison ou dans un loft de 300 m2 que dans un petit studio.


3. Profitez-en pour faire des choses que vous ne faites jamais

A moins que vous ne soyez professionnel-le de santé, que vous travaillez dans les secours, ou que vous soyez représentant d’une autre profession réquisitionnée en ce moment, vous êtes assigné-e à résidence.

Profitez en pour vous rouler en boule, faire sans aucune culpabilité des choses que vous ne pouvez pas faire d’habitude, par manque de temps ou parce que vous vous dites que vous avez mieux à faire.


Reposez-vous, beaucoup, faites ce qui vous fait plaisir, laissez-vous faire des choses régénérantes sans aucune culpabilité.


Et si vous en avez envie, profitez-en pour aller jeter un œil aux sujets qui vous aideront à vous sortir de l’obsession alimentaire, tout doucement.


Je vous invite à aller, par exemple, regarder des vidéos ou lire tout ce que vous trouverez comme articles sur l’hypersensibilité et la communication non violente, deux sujets incontournables quand on est boulimique ou hyperphage.


4. Souvenez-vous que ce n’est pas top du tout, mais qu’on est tous dans la même galère

Essayez, si possible, de relativiser en vous souvenant que, certes ce n’est pas optimal comme situation, mais que, pour le coup, tout le monde est logé à la même enseigne. Certes, les TCA font que l’angoisse subie est particulièrement importante, mais dites-vous bien que tout le monde est touché, d’une manière ou d’une autre, par ces circonstances, économiquement, logistiquement, voire pire, sanitairement.

C’est NORMAL de mal vivre cet épisode si vous êtes boulimique ou hyperphage, surtout que j’ai fort à parier que vous détestez l’incertitude et le sentiment d’impuissance (notre personnalité est ainsi faite), mais vous ne pouvez rien y faire! Enfin, presque…


5. Prenez vos responsabilités personnelles

Cet épisode est l’occasion de rappeler un principe qui m’est cher : on est responsable de soi, à 100%.

Dans un tel contexte, plus que jamais plus grand service que l’on puisse rendre à la société, c’est de prendre soin de soi.

Une grande partie du problème vient de la négligence des gens à leur propre égard.

Trop de personnes se tuent à vouloir sauver le monde entier, en s’oubliant complètement, en omettant de se protéger et ce n’est PAS responsable. C’est une erreur énorme de penser que prendre soin de soi est égoïste : je le répète, c’est le MEILLEUR SERVICE QUE VOUS PUISSIEZ RENDRE A LA SOCIÉTÉ. Se mettre en danger pour sauver tout le monde n’est pas généreux.

Mais il y a pire encore : des gens sont EXPOSES tous les jours, parce qu’ils possèdent de compétences dont a besoin.

Et je ne pense pas seulement aux personnels de santé, mais aussi aux gens auxquels on pense moins, comme les caissiers et caissières par exemple, qui voient défiler des centaines de personnes par jour.

Alors, si VOUS, vous êtes comme moi et que vous n’avez pas un besoin impérieux de sortir, ne le faites pas.

Surtout, ne vous mettez pas en mode  » Je suis plus fort que tout ça, moi j’ai besoin de sortir. » Si vous avez besoin de sortir, prenez vos précautions pour ne pas vous exposer ni exposer les autres.

Et aider, c’est formidable, mais faites-le AVEC BON SENS.

Faisons un parallèle : dans les métiers du secours à la personne, par exemple, les professionnels ne sont PAS incités à jouer les super-héros.

Ce qui est exigé, c’est d’abord de se protéger, soi, en premier, pour éviter le sur-accident. Quelqu’un qui se retrouve dans la panade parce qu’il ne s’est pas protégé devient une victime de plus et ça n’a d’autre effet que de créer des ennuis supplémentaires.


C’est le principe aussi du masque à oxygène dans l’avion : on se le met d’abord à soi, avant d’aider les autres.


Et ce n’est pas égoïste, c’est juste du bon sens. Quand on s’est mis dans le rouge écarlate à force de ne pas s’écouter, on devient juste une personne à secourir de plus.


Beaucoup de problèmes viennent du pseudo esprit de sacrifice :  » Je pense aux autres avant de penser à moi « . Énorme connerie.


Je cite souvent ce passage du Nouveau Testament, que j’aime rappeler à mes clients lorsqu’ils veulent sauver la terre entière (et à moi-même quand je retombe dans ce travers et veut mettre ma cape de super-héros) : « Je demande la miséricorde, non le sacrifice. » (Matthieu, 12:7)
Ou encore Marc (12:31) : «  Tu aimeras ton prochain comme toi-même. Il n’y a pas de commandement plus grand que celui-là. »

Le bon sens et la bonté, c’est de prendre soin de soi. Prendre soin de soi, c’est prendre soin des autres en évitant la propagation.


Je pense à une de mes clientes, pharmacienne, qui travaille en ce moment le double, voire le triple de son nombre d’heures habituelles.


Son patron lui a demandé de venir travailler aujourd’hui, alors qu’elle avait prévu un jour off, à la maison. Se sentant déjà très fatiguée par ces derniers jours et sachant ce qui l’attend dans les jours à venir, elle a eu l’immense bon sens de lui dire qu’elle préférait ne pas venir, si c’était possible et lui a proposé, en échange de faire un jour supplémentaire plus tard dans la semaine.

Elle s’est refusée à jouer les super-héros et a décidé de faire ce qu’il fallait : prendre soin d’elle, aussi et avant tout, pour tenir bon et continuer à servir les clients pendant les jours à venir, au lieu de se griller complètement et de ne plus pouvoir rien faire.


Ne vous mettez pas en danger pour rien. Reposez-vous, faites attention à vous. Profitez de ce moment pour prendre des nouvelles des gens qui vous sont chers, mais ne vous oubliez pas.

Comme toujours, je vous invite à faire au mieux avec ce que vous avez. Vous ne pouvez faire plus que de votre mieux.

Et je vous souhaite une bonne santé et du courage.

Masha


Termes de recherche: TCA et coronavirus ; coronavirus et boulimie ; gérer le coronavirus quand on a des TCA ; covid-19 et troubles alimentaires ; boulimie, hyperphagie, peur de manquer ; pénurie alimentaire

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