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Tout sur la personnalité borderline

A différentes occasions, j’ai fait le lien entre l’addiction alimentaire et la personnalité borderline, avec la promesse d’en dire davantage à ce sujet. Peut-être avez-vous déjà parcouru mon autre article : « Je suis boulimique, donc borderline? » dans lequel je partage le récap d’Igor Thiriez.

Pour déterminer à quelle type de personnalité ils ont affaire, les psys s’appuient entre autres sur un ouvrage qu’on appelle le DSM-IV, le Manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux…

Quoi ?! « TROUBLES » MENTAUX ?!!!

Alors oui, cela fait un peu peur comme ça, mais pas de panique, vous allez voir que ce n’est pas si terrible que cela en a l’air.

NB : avant d’aller plus loin et à toutes fins utiles, je rappelle n’être ni psy, ni médecin. L’article ci-dessous ne représente pas un point de vue médical et reflète exclusivement mes recherches personnelles.

✨✨✨✨✨

Le DSM-IV en très bref

Pour la détermination des troubles de la personnalité, le Manuel diagnostique et statistiques des troubles mentaux, ou DSM-IV, fonctionne de la manière suivante : pour chaque type de personnalité, il énumère des caractéristiques et types de comportement qui lui sont propres (par exemple la personnalité antisociale, paranoïaque, dépendante,..borderline…etc). Si une personne réunit X de ces comportements, elle peut être diagnostiquée comme ayant tel ou tel type de personnalité. Pour vulgariser à l’extrême, cela fonctionne un peu comme un test de personnalité dans les magazines. Si je me reconnais dans tels et tels comportements, alors j’ai probablement tel type de personnalité.

Bien évidemment, la réalité est toujours un peu moins rigide que les systèmes de classification, mais cela permet aux praticiens de diagnostiquer et d’adapter leur traitement, si besoin. Chaque personne peut par ailleurs cumuler différents types de personnalités, à des degrés différents, ou se reconnaître dans quelques caractéristiques uniquement, sans pour autant embrasser l’ensemble des critères liés à une personnalité.

Mais alors, borderline, c’est juste un type de personnalité, ou c’est un trouble de la personnalité ?

En fait, ce qui rend la personnalité borderline pathologique et donc, constitutive d’un trouble, c’est lorsqu’elle handicape les relations avec les autres au quotidien, dans des circonstances normales (vulgarisation numéro 2 : je ne parle pas des pétages de plomb occasionnels, qui surviennent en situation de stress, de grande tristesse, ou de choc émotionnel, mais bien de comportements socialement problématiques dans la vie de tous les jours lorsque, en principe, tout devrait bien se passer).

Pour reprendre les termes du DSM-IV, « Les traits de personnalité ne constituent des troubles que lorsqu’ils sont rigides et inadaptés et qu’ils causent une souffrance subjective ou une altération significative du fonctionnement» Que cela soit bien clair : avoir une personnalité de tel ou tel type n’est en aucun cas un « problème » ou un « trouble » en soi.

Tout ce que signifie c’est que, dans une situation donnée, on aura tendance à réagir d’une certaine manière plutôt que d’une autre. Ce qui est un problème, c’est de laisser des comportements dont on n’a pas conscience polluer complètement le quotidien et nos relations avec les autres. J’insiste vraiment là-dessus.

Une personnalité borderline est simplement une personnalité borderline. Point barre. Elle signifie qu’on a tendance à faire ceci ou cela, que dans la plupart des cas, on réagit de telle manière à telle situation. Une personnalité borderline n’est un trouble de la personnalité que lorsque ces mêmes réactions et comportements sont effectués inconsciemment, ou qu’on ne les a jamais remis en question, qu’on fait n’importe quoi, notamment dans nos interactions avec les autres et qu’on est en grande souffrance au quotidien.

Quand on est doté(e) d’une personnalité borderline, c’est vrai qu’on reste toujours un peu bizarre, toute sa vie. Mais dans le bon sens ! Disons, atypique, plutôt, c’est plus joli.🌼

On peut tout à fait être borderline et apprendre à communiquer correctement avec les autres et à se traiter soi-même correctement. Ainsi, on en garde juste cette drôle de personnalité qui nous rend un peu différent(e) mais on vit heureux(se), y compris en compagnie des autres. 🙂

Caractéristiques générales de la personnalité borderline

DSM IV : « La Personnalité borderline est caractérisée par une impulsivité marquée et une instabilité des relations interpersonnelles, de l’image de soi et des affects. »

Les affects, dans le langage psy, ce sont les humeurs, les sentiments et les émotions. En général, ces caractéristiques se manifestent dès le début de l’âge adulte.

Parfois, des circonstances extérieures (par exemple : situation de stress particulière, état transitoire lié à la prise de médicaments ou au manque de sommeil, choc émotionnel), peuvent créer des comportements impulsifs ou une instabilité, sans pour autant faire de la personne un(e) borderline.

Pour être parfaitement claire : avoir des moments d’impulsivité, ou se sentir bizarre dans certaines circonstances, ne fait pas de vous une personne dotée d’une personnalité borderline. Cette définition, ainsi que les critères listés plus loin doivent être stables dans le temps et présents dans différentes situations.

Le DSM-IV précise également que « le mode de comportement observé dans la personnalité borderline a été identifié dans de nombreux pays. Les adolescents et les jeunes adultes qui ont des problèmes d’identité (surtout quand cela est accompagné par l’utilisation d’une substance) peuvent présenter transitoirement des comportements qui peuvent faire penser à tort à une personnalité borderline. Ces situations sont caractérisées par une instabilité émotionnelle, des dilemmes «existentiels », de l’incertitude, des choix générateurs d’anxiété, des conflits concernant l’orientation sexuelle et des pressions sociales contradictoires concernant les choix de carrière. »

Comme certains comportements ou caractéristiques peuvent se retrouver dans différents types de personnalités, il est important de retenir que la personnalité borderline réunit au moins cinq des neuf critères suivants. En-deçà, on n’est pas dans une personnalité borderline. De même, ce n’est pas parce qu’on a une personnalité borderline, qu’on correspond aux neufs comportements énumérés ci-dessous. On peut aussi avoir fonctionné d’une certaine manière dans le passé et ne plus fonctionner ainsi aujourd’hui (après avoir suivi une thérapie ou travaillé sur soi, par exemple).

Selon le DSM-IV, « bien que la tendance aux émotions intenses, l’impulsivité et l’intensité dans les relations interindividuelles durent souvent toute la vie, les sujets qui entament une action thérapeutique manifestent souvent une amélioration débutant parfois au cours de la première année. La plupart de ces sujets deviennent plus stables dans leurs relations et leur travail au cours de la trentaine et de la quarantaine. » C’est hyper encourageant, non? 🙂

Concrètement, selon le DSM-IV, une personne est dotée d’une personnalité borderline, si elle réunit au moins 5 des 9 critères suivants et ce, de manière stable dans le temps :

Critère 1 

Les sujets qui ont une personnalité borderline font des efforts effrénés pour éviter les abandons réels ou imaginés.

DSM-IV : « Ces sujets sont très sensibles aux circonstances de l’environnement. Ils ressentent une peur intense d’être abandonnés et une colère inappropriée quand ils sont confrontés à une séparation, même compréhensible et limitée dans le temps, ou à une modification inévitable de l’emploi du temps (ils ressentent (…) [par exemple] de la panique ou de la rage quand une personne importante à leurs yeux est en retard de quelques minutes ou doit annuler un rendez-vous). Ils peuvent croire qu’ils sont « abandonnés » parce qu’ils sont « mauvais ». Ces peurs d’être abandonné sont liées à l’intolérance à la solitude et au besoin d’avoir d’autres gens avec soi. Les efforts effrénés pour éviter l’abandon peuvent aller jusqu’à des actes impulsifs comme des automutilations ou des gestes suicidaires, décrits dans le Critère 5. »

Critère 2 

Mode de relations instables et intenses.

DSM – IV : « Ils peuvent idéaliser un partenaire potentiel ou une personne qui pourrait leur accorder de l’attention après seulement une ou deux rencontres, exiger de passer beaucoup de temps avec cette personne et partager les détails les plus intimes dès le début de la relation. Toutefois, ils peuvent basculer très vite de l’idéalisation à la dévalorisation, estimant que cette personne ne s’occupe pas assez d’eux, ne donne pas assez ou n’est pas assez présente. Ils peuvent éprouver de l’empathie et prendre soin d’autrui mais seulement dans l’attente que l’autre sera à son tour disponible pour satisfaire leurs besoins et exigences. Leur opinion des autres peut se retourner brusquement, le partenaire étant tour à tour vu comme un soutien généreux puis comme méchant et cruel. De telles oscillations traduisent souvent le fait qu’ils sont déçus par une personne dont le soutien était idéalisé, puis dont le rejet ou l’abandon est anticipé. »

Critère 3 

Perturbation de l’identité caractérisée par une instabilité marquée et persistante de l’image ou de la notion de soi

DSM-IV : existence de « retournements brutaux et dramatiques de l’image de soi, avec des bouleversements des objectifs, des valeurs et des désirs professionnels. Les idées et les projets concernant la carrière, l’identité sexuelle, les valeurs et le type de fréquentations peuvent changer soudainement. Ces individus peuvent passer brutalement d’une position où ils quémandent de l’aide à l’idée qu’ils ont le droit de se venger pour les mauvais traitements reçus dans le passé. Bien que leur image de soi soit fondée sur la notion d’être bon ou mauvais, ils peuvent parfois avoir le sentiment de ne pas exister du tout. Ce sentiment survient habituellement dans les situations où le sujet ressent l’absence d’une relation significative, de soutien et de support. Leurs performances peuvent chuter quand le cadre professionnel ou scolaire est peu structuré. »

Critère 4

Impulsivité dans au moins deux domaines potentiellement dommageables

Jeu, dépenses irresponsables, crises de boulimie, usage de drogues, pratiques sexuelles dangereuses ou conduite imprudente.

Critère 5

Présence de comportements, de gestes ou de menaces suicidaires ou de comportements auto-mutilatoires

Critère 6 

Instabilité affective due à une réactivité marquée de l’humeur

Le DSM IV évoque par exemple des « épisodes de dysphorie intense* (*état de malaise douloureux, en opposition à l’euphorie), d’irritabilité ou d’anxiété qui durent habituellement quelques heures et rarement plus de quelques jours) (…) Leur humeur dysphorique de base est souvent entrecoupée de périodes de colère, de panique ou de désespoir et est plus rarement éclaircie par des périodes de bien-être ou de satisfaction.  (mettre lien vers autre article : la boulimie, c’est quoi ? Dans lequel je parle du fait qu’on se sent toujours mal, sauf cas exceptionnels). Ces épisodes peuvent refléter la sensibilité extrême de l’individu aux facteurs de stress interpersonnels. Ces sujets peuvent être troublés par des sentiments chroniques de vide. »

Critère 7 

Ils s’ennuient facilement et recherchent en permanence une occupation (je ne peux m’empêcher de sourire en imaginant éventuellement certaines personnes de mon entourage lire ça 🙂 )

Critère 8

Expression fréquente de rages intenses et inappropriées, difficultés à contrôler la colère.

DSM-IV : «Ils peuvent alors être très sarcastiques et acerbes et avoir des paroles très virulentes. La colère du sujet est souvent provoquée par l’impression que son partenaire ou la personne qui s’occupe de lui le néglige, ne donne pas assez, n’est pas assez attentionné ou risque de le quitter. Ces accès de colère sont souvent suivis par de la honte et de la culpabilité et contribuent à l’impression qu’a le sujet d’être mauvais. »

Critère 9

Survenue d’une idéation persécutoire ou de symptômes dissociatifs transitoires en période de stress

C’est-à-dire : s’imaginer qu’on est persécuté (paranoïa) et se sentir à l’extérieur de son corps, ou du moins ne pas se sentir habiter son corps (ce qui, je crois, est le cas de quasiment tous(tes) les boulimiques).

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A quoi ça m’avance, de savoir tout ça? Et qu’est-ce que je fais si je me reconnais là-dedans ?

Déjà, pas de panique. Ce qui est super, c’est de pouvoir prendre conscience qu’on fonctionne selon certains schémas, au lieu de continuer à subir son quotidien, sans comprendre ce qui nous arrive. Ce n’est pas la découverte d’une étiquette psy ou médicale qui va changer quoi que ce soit : si vous avez ce type de comportements, votre souffrance est déjà là et le fait de mettre des mots ou des diagnostics dessus, même si ça peut faire peur, n’est pas ce qui va accentuer vos difficultés. Pouvoir en savoir davantage sur son type de personnalité, c’est déjà énorme.

Cela fait mal, parce qu’on se rend compte qu’on peut à la fois être en grande souffrance ET, quelque part, porter en soi des dysfonctionnements qui créent ces souffrances, qui ne viennent pas des autres ou de l’environnement. Cela apporte une prise de conscience qu’on doit remettre en cause ou, du moins, questionner nos comportements.

Le message majeur, malgré tout, de cette classification un peu froide, c’est surtout un

Message très optimiste

Si vous êtes en souffrance actuellement, cela peut changer.

Ce que j’aimerais vraiment transmettre aussi, c’est que

Si vous êtes boulimique, vous voyez que vos souffrances ne viennent pas directement des boulimies elles-mêmes

mais de l’usage dysfonctionnel de votre personnalité (même pas de la personnalité elle-même, simplement du fait de ne pas encore avoir appris comment il faut faire, comment interagir et se comporter).

Preuve supplémentaire que, ce sur quoi il faut se concentrer, ce n’est pas son comportement alimentaire, ses apports caloriques, le contrôle de son corps, mais bien travailler à apaiser ses relations avec les autres et apprendre à écouter ses envies, pour se libérer de ce sentiment de vide vertigineux. En procédant ainsi, les boulimies finiront par disparaître toutes seules.

Je serais extrêmement curieuse de connaître vos réactions en commentaire ou par mail (masha@bouledevie.com, si vous préférez garder l’anonymat).

Chaleureusement, amicalement,

❤️ Masha

Vous pouvez suivre Bouledevie sur Twitter, Instagram (bon, j’y mets aussi beaucoup de photos de mon chat) et Facebook, ou rejoindre le groupe de soutien Facebook Bouledevie.

Pour télécharger gratuitement : « 5 secrets pour avancer dans la vie… même quand on est borderline« , cliquez ICI.

Illustration à la une : Dorian Vallejo.

5 Comments

  • Clémentine

    Super article ! Très complet et accessible grâce à ta façon de vulgariser tout ça. J’ai bien aimé en te lisant avoir l’impression que tu me parles avec beaucoup de soin et de douceur. ça me rappelle l’époque où en énorme souffrance je faisais moi aussi mes recherches, tomber sur ton blog m’aurait fait du bien à l’époque sûrement. Merci !

  • Virginie Loÿ

    Très bon article, merci Masha.

    J’ai souvent vu ce terme utilisé dans des groupes FB regroupant des personnes victimes de relations toxiques, de perversion narcissique, de violence conjugale, mas sans savoir de quoi il s’agissait.
    (soit-dit en passant, la personnalité borderline y est « attribuée » indifféremment soit à la victime soit à l’agresseur, et on comprend bien que c’est tout à fait possible de devenir sans doute l’un ou l’autre, à la lecture de ton article).
    Le plus important, c’est comme pour tout: comprendre ce qui nous fait agir, que ce soient nos pensées ou un trouble est la première étape pour trouver des solutions 🙂

    • Bouledevie

      Merci Virginie pour ton commentaire 🙂 En effet, il y a définitivement des ponts entre les deux. D’ailleurs, les borderline (à commencer par moi-même) adoptons parfois des comportements similaires à ceux de personnalités manipulatrices ou narcissiques (je prévois de faire un article là-dessus, mais c’est un sujet délicat)… La différence entre les borderline et les personnalités disons « toxiques », c’est l’intention qui réside derrière les actions, le fort sentiment de culpabilité et l »estime de soi quasiment nulle. Dans tous les cas, il y a des liens très intéressants qui se dessinent et je ne cesse de m’inspirer de ton blog pour creuser cette piste. Amitiés, Masha

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